Le déficit en Alpha1 Antitrypsine

QU'EST CE QUE L’ALPHA 1 ANTITRYPSINE ?

L’alpha-1 antitrypsine est une protéine sanguine synthétisée par le foie.

Elle est présente en grande quantité dans l’organisme et son taux dans le sang peut être multiplié par 3 ou 4 au cours des infections et des agressions pulmonaires diverses.

Son rôle est de protéger l’organisme contre des enzymes (protéases) libérées par certaines cellules au cours des processus inflammatoires.

Ces protéases sont dangereuses pour les poumons, en particulier parce qu’elles détruisent les fibres élastiques des poumons, ce qui entraîne l’emphysème.

L’alpha 1 antitrypsine est une des principales anti protéases de l’organisme. En cas de déficit, il existe donc un déséquilibre entre les protéases et la protection fournie par les anti protéases.

L’ensemble aboutit alors à la destruction des parois des alvéoles pulmonaires.

L’une des principales conséquences du déficit en AAT est donc l’insuffisance de protection du poumon profond vis à vis des effets nocifs du tabac ou des agressions extérieures qui augmentent les protéases dans les poumons.

Le diagnostic / le dépistage

Une simple prise de sang suffit pour connaître son taux d’Alpha1-antitrypsine. Si le taux est inférieur à la normale, on procède alors à une recherche du phénotype ou génotypes et des allèles.

Il existe plus d’une centaine d’allèles mais les plus fréquentes sont :

M (normal) – Z (déficient) – S (déficient) – Nul (déficient)

Les phénotypes possibles

Relation phénotype – concentration sérique

Déficit : < 11 ɥmole/l ou < 50 mg/dL

Les niveaux de risque selon les phénotypes

La transmission de la maladie

Le déficit en alpha-1 antitrypsine est une maladie génétique retrouvée plus fréquemment dans les populations d’Europe du Nord.

Deux mutations au niveau du gène qui contrôle sa synthèse entraînent soit une absence complète de cette protéine (déficit complet : allèle nul), soit la production d’une protéine anormale, mal sécrétée par le foie et responsable d’un taux sanguin très faible (déficit incomplet: allèle Z ou S).

L’affection se transmet sur un mode autosomique dominant (comme pour les groupes sanguins) : le déficit survient lorsque les parents transmettent chacun à leur enfant un allèle nul, un allèle S ou un allèle Z.

Toutefois de nombreux sujets déficitaires en alpha-1 antitrypsine présenteront peu ou pas symptômes respiratoires, tout particulièrement en l’absence de tabagisme (d’où importance de l’enquête génétique dans la famille des patients atteints, qui permet d’identifier les personnes ayant un déficit et chez lesquelles le tabac constitue un risque majeur de conduire à l’emphysème).

L’analyse du déficit peut être déterminée aisément sur un prélèvement sanguin par certains laboratoires (dosage de l’alpha 1 antitrypsine et caractérisation de l’anomalie d’origine génétique).

Concrètement

Le déficit en AAT est causé par un ou une paire de gènes déficients.

Chaque parent transmet l’un de ses deux gènes.

Il faut que les parents aient au moins 1 gène déficient (S, Z ou Nul) et donnent chacun un gène normal ou déficient. Il y a alors :

  • 1 risque sur 4 pour que les parents donnent tous les deux un gène déficient ce qui engendre un enfant avec un déficit sévère ou très sévère (ZZ ou SZ ou Z-Nul)
  • 1 chance sur 4 pour que l’enfant ait 2 gènes normaux (MM)
  • 2 risques sur 4 pour que l’enfant ait un déficit modéré (MS, MZ)

L'ATTEINTE HÉPATIQUE

L’atteinte du foie occasionnée par le déficit en AAT été reconnue plusieurs années après l’atteinte pulmonaire (1969).

Elle n’est pas un signe obligatoire de la maladie dans le sens où une personne peut avoir un déficit en AAT et avoir un foie sain tout au long de sa vie.

Cette atteinte hépatique a une autre particularité. Quand elle existe, elle peut être de degré variable allant d’un foie légèrement agrandi mais de fonction normale, à la fibrose, au cancer ou à la cirrhose du foie, maladie grave pouvant nécessiter une greffe de foie.

Longtemps considéré comme un symptôme ne touchant que les enfants, la connaissance de la maladie et la prise en charge pluridisciplinaire des patients ont permis de démontrer que l’atteinte hépatique touche également les adultes. L’alcool favorisant l’apparition de symptômes même si consommée en petite quantité ainsi que le surpoids et l’obésité.

Le foie chez les enfants ayant un Déficit en Alpha-1 antitrypsine

L'EMPHYSÈME PULMONAIRE PAR DÉFICIT EN ALPHA-1 ANTITRYPSINE

L’emphysème pulmonaire est une des formes de la broncho-pneumopathie chronique obstructive (BPCO).

Il est caractérisé par une augmentation permanente du volume des poumons avec destruction des parois des alvéoles et peut entraîner une insuffisance respiratoire plus ou moins marquée.

On peut distinguer deux types d’emphysème (mais les formes mixtes sont fréquentes).
– L’emphysème centro-lobulaire, succédant à une bronchite chronique, essentiellement lié au tabac, se manifeste après 50 ans et est présent dans la plupart des BPCO.
– L’emphysème pan-lobulaire, qui peut être d’origine génétique lié à un déficit en alpha-1 antitrypsine, débute à un âge plus précoce.

Le déficit en alpha-1 antitrypsine est responsable d’une faible proportion des emphysèmes.

Le tabac, responsable de la très grande majorité des cas d’emphysème, constitue un facteur aggravant de l’emphysème primitif déficitaire.

Diagnostic de l’emphysème déficitaire

Il s’agit le plus souvent d’un sujet de sexe masculin, longiligne, maigre, fumeur ou
ancien fumeur, qui se plaint d’un essoufflement surtout à l’effort, d’installation insidieuse et d’aggravation progressive.

Cet emphysème peut survenir avant 30-40 ans.

L’examen clinique est assez caractéristique : le thorax est distendu, l’ampleur des mouvements de la cage thoracique est diminuée avec une expiration prolongée, à travers des lèvres pincées à un stade évolué.

La radiographie standard et le scanner thoraciques montrent la distension thoracique, avec une augmentation du volume pulmonaire.

L’exploration fonctionnelle respiratoire confirme le diagnostic. L’évolution se fait vers l’aggravation de l’essoufflement (dyspnée) avec baisse de la concentration artérielle en oxygène, et plus tardivement, augmentation du taux de gaz carbonique.

Traitement de l’emphysème

Le traitement médical comprend les mesures habituellement prescrites dans la prise en charge de la BPCO, au premier rang desquelles figure l’arrêt complet et définitif du tabac.

Il s’agit de la mesure essentielle avec un bénéfice d’autant plus net que l’arrêt est précoce, avant l’installation d’une insuffisance respiratoire.

Les traitements symptomatiques font appels aux antibiotiques en cas de surinfection bronchique et aux bronchodilatateurs et à l’oxygène qui peuvent améliorer un peu le confort des malades.

Une place importante est faite aujourd’hui à la réhabilitation respiratoire, afin d’optimiser la capacité respiratoire.

Plusieurs mesures préventives peuvent être également mises en place, telles que la vaccination antigrippale et anti-pneumococcique, l’aménagement du poste de travail afin d’éviter les atmosphères enfumées et le traitement d’un éventuel terrain allergique sous-jacent.

Chez les malades emphysémateux présentant un VEMS vraiment abaissé, ils peuvent être traités par l’administration intraveineuse régulière (1 fois pas semaine en générale) d’alpha-1 antitrypsine naturelle, qui pourrait ralentir dans certains cas l’évolution de la maladie.

La pose de valves pulmonaires pour réduire les espaces creux du poumon donne des résultats aléatoires. Elle peut fonctionner pour certains et pas du tout pour d’autres ce qui nécessite le retrait de celles-ci.

La chirurgie de réduction de volume d’emphysème est actuellement à l’étude.

Enfin, au stade ultime de la maladie, une transplantation pulmonaire peut être proposée chez des patients encore jeunes (idéalement moins de 60 ans).

Les poumons chez les enfants atteints d’un DAAT

Le DAAT chez les adultes

PRÉCAUTIONS - PRÉVENTION

L’exposition continue ou récurrente à des aéro-contaminants susceptibles d’accroître la charge protéasique intra pulmonaire est le seul facteur connu de développement de l’emphysème.

Les grandes villes polluées sont à éviter. La campagne est préférable dans ce cas. Les métiers en contacts avec mes fumées, les farines, les poussières, les pollutions doivent faire l’objet du port obligatoire d’un équipement de protection adapté.

L'ARRÊT DU TABAC EST IMPÉRATIF

et la protection du sujet à l’égard d’éventuels aéro-contaminants professionnels est fortement recommandée.

ÉVITER LES MILIEUX ENFUMÉS

et interdire aux personnes de fumer en présence d’une personne ayant un déficit en AAT même modéré.

ÉVITER LA CONSOMMATION D’ALCOOL

Dès lors que l’on est porteur d’un Z, la consommation d’alcool doit rester exceptionnelle.

L’ACTIVITÉ PHYSIQUE ET SPORTIVE EST RECOMMANDÉE

par les médecins afin d’entretenir une bonne capacité respiratoire.

ALIMENTATION ÉQUILIBRÉE

permet d’éviter le sur-poids et l’obésité qui peuvent entrainer des symptômes hépatiques.

LA RÉHABILITATION À L’EFFORT EST ÉGALEMENT RECOMMANDÉE

pour les personnes atteintes d’un emphysème. Les expériences des uns et des autres montrent bien un bénéfice certain.

LES TRAITEMENTS

L’exposition continue ou récurrente à des aéro-contaminants susceptibles d’accroître la charge protéasique intra pulmonaire est le seul facteur connu de développement de l’emphysème.

Les grandes villes polluées sont à éviter. La campagne est préférable dans ce cas.

Un équipement professionnel de protection spécifique doit être porté pour les métiers en contact avec les fumées, les farines, les poussières, les produits divers, les pollutions.

Médicamenteux

Il n’y a pas de traitement préventif ni curatif.

  • Pour l’atteinte hépatique, on peut donner un médicament qui aide le foie dans le cas d’atteinte hépatique (ursolvan, delursan, Ursolfak…) mais sans aucunes certitudes sur l’efficacité du médicament (qui est en fait de la bile synthétique concentrée)

En cas de cirrhose du foie, cas très rare, seule une greffe de foie peut sauver la vie du patient.

  • Pour l’insuffisance respiratoire, il existe des inhalateurs pour améliorer la fonction respiratoire. La rééducation respiratoire est vivement conseillée.

Il existe également une thérapie par augmentation d’Alpha-1 Antitrypsine dans la sang. Elle permet d’augmenter le taux d’AAT dans le sang.

Trois laboratoires fabriquent ce traitement pour la France :
– LFB, laboratoire français, fabrique l’Alfalastin
– CSL Behring, laboratoire australien, fabrique le Respreeza
– Grifols, laboratoire espagnol, fabrique le Prolastin

Ces produits, extraits du plasma humain, demandent entre 6 et 9 mois de fabrication. Ils doivent être injectés hebdomadairement par voie intra-veineuse.

Une fois le traitement commencé, il doit être administré à vie.

Ces perfusions permettent en général de limiter le nombre d’infections pulmonaires, de ralentir l’évolution de l’emphysème et même parfois de le stabiliser plus ou moins longtemps.
 

La chirurgie

La réduction pulmonaire en cas d’emphysème n’apporte aucun bénéfice chez les patients atteints du déficit en alpha-1 antitrypsine. Toutefois la réduction pulmonaire par valves commence à être proposée et d’autres dispositifs pourraient voir le jour.

Lorsque l’emphysème est très évolué, une transplantation pulmonaire (greffe de poumons) peut être proposée. Elle reste pour le moment la seule issue mais doit aussi être considérée comme le dernier recours à une qualité de vie complètement dégradée.

Lors de l’atteinte hépatique, si une cirrhose s’est installée, il faut savoir que son évolution est très lente et évolue sur plusieurs années.

Lorsque le foie ne peut plus assurer correctement ses fonctions, la transplantation hépatique (greffe de foie) est là encore la seule solution.